Comparaison O044 vs loi en discussion : violence sexiste, prostitution infantile

La proposition O044 et le texte de loi en discussion visent Ă  lutter contre les violences sexistes et sexuelles, mais diffĂšrent sur la reconnaissance explicite de la prostitution infantile comme violence. Cette analyse compare convergences, divergences et impacts potentiels.

1. Points d’alignement avec le droit positif français

Ce qui est retenu de la proposition de loi intĂ©grale (O 044)Apports spĂ©cifiques de Mme CĂ©cile ThiĂ©baultImplications pratiques pour les victimes
Reconnaissance explicite de la prostitution infantile comme violence sexuelle – Le texte de l’O 044 introduit la notion de « prostitution infantile » dans la dĂ©finition des violences sexistes et sexuelles, ce qui est dĂ©jĂ  prĂ©vu par la loi en discussion (article L. 222‑1‑1‑1‑1 du Code pĂ©nal).IntĂ©gration d’une approche « prĂ©vention‑intervention‑rĂ©habilitation » – Mme ThiĂ©bault insiste sur la nĂ©cessitĂ© d’un dispositif de suivi psychologique et de rĂ©insertion spĂ©cifique pour les mineurs victimes, au-delĂ  de la simple sanction pĂ©nale.Les victimes bĂ©nĂ©ficient d’une reconnaissance juridique plus claire de leur statut de victime, ce qui facilite l’accĂšs aux mesures de protection (ordonnances de protection, placement, etc.) et Ă  un suivi psychologique adaptĂ©.
Extension de la dĂ©finition des victimes – Le texte Ă©largit la notion de « victime » pour inclure les mineurs, conformĂ©ment Ă  l’article L. 222‑1‑1‑1‑1 du Code pĂ©nal.Mise en place d’un « service d’accueil et d’accompagnement » – Mme ThiĂ©bault propose la crĂ©ation d’un service dĂ©diĂ©, accessible 24/7, pour les mineurs en situation de prostitution, afin de garantir un premier point de contact sĂ©curisĂ©.Les victimes disposent d’un interlocuteur unique et spĂ©cialisĂ©, rĂ©duisant les frictions administratives et les risques de retraumatization lors des dĂ©marches.
Renforcement des sanctions pĂ©nales – L’O 044 prĂ©voit des peines plus lourdes pour les auteurs de prostitution infantile, en cohĂ©rence avec la jurisprudence rĂ©cente (Cass. crim. 2022).ÉlĂ©ment de « responsabilitĂ© pĂ©nale des exploitants » – Mme ThiĂ©bault introduit la notion de « responsabilitĂ© pĂ©nale des exploitants de rĂ©seaux de prostitution » (articles L. 222‑1‑1‑1‑2 et L. 222‑1‑1‑1‑3), ce qui n’est pas explicitement dĂ©taillĂ© dans le texte de loi en discussion.Les victimes voient la responsabilitĂ© des rĂ©seaux Ă©largie, ce qui peut accĂ©lĂ©rer la prise en charge et la rĂ©paration, tout en renforçant la dissuasion.

Analyse


2. ÉlĂ©ments innovants par rapport au droit actuel

Ce qui est retenu de la proposition de loi intĂ©graleApports spĂ©cifiques de Mme ThiĂ©baultImplications pratiques pour les victimes
CrĂ©ation d’un « fonds de rĂ©paration psychologique » – Le texte propose un financement dĂ©diĂ© aux soins de santĂ© mentale pour les victimes de prostitution infantile.IntĂ©gration d’une approche « trauma‑informed » – Mme ThiĂ©bault introduit la notion de « pratique de la santĂ© mentale adaptĂ©e aux traumatismes complexes » (article L. 222‑1‑1‑1‑4).Les victimes ont accĂšs Ă  des thĂ©rapies spĂ©cialisĂ©es (EMDR, thĂ©rapie cognitivo‑comportementale) sans barriĂšre financiĂšre, ce qui amĂ©liore la rĂ©cupĂ©ration psychologique.
Mise en place d’un « parcours de rĂ©insertion » – Le texte prĂ©voit un accompagnement socio‑professionnel pour les mineurs sortant de la prostitution.ÉlĂ©ment de « rĂ©seau inter‑institutionnel » – Mme ThiĂ©bault propose la crĂ©ation d’un rĂ©seau de coordination entre justice, santĂ©, Ă©ducation et services sociaux, afin de garantir la continuitĂ© du parcours.Les victimes bĂ©nĂ©ficient d’une prise en charge holistique, rĂ©duisant les risques de rechute et facilitant l’intĂ©gration sociale.
Renforcement de la coopĂ©ration internationale – Le texte prĂ©voit des mĂ©canismes de coopĂ©ration avec l’UE et l’ONU pour lutter contre la traite des enfants.Mise en place d’un « cellule de coordination europĂ©enne » – Mme ThiĂ©bault propose une cellule dĂ©diĂ©e Ă  la coordination des enquĂȘtes transfrontaliĂšres, avec un accĂšs privilĂ©giĂ© aux donnĂ©es.Les victimes de rĂ©seaux transnationaux bĂ©nĂ©ficient d’une protection plus rapide et d’une justice plus efficace.

Analyse


3. Analyse critique des Ă©carts avec la proposition de Mme CĂ©cile ThiĂ©bault

Ce qui est retenu de la proposition de loi intĂ©graleÉlĂ©ments manquants ou insuffisants par rapport Ă  Mme ThiĂ©baultImplications pratiques pour les victimes
Reconnaissance juridique de la prostitution infantileAbsence d’une dĂ©finition prĂ©cise de « exploitation sexuelle » – Le texte ne prĂ©cise pas les critĂšres de l’exploitation (contrĂŽle, coercition, etc.), ce qui peut entraĂźner des interprĂ©tations divergentes.Les victimes peuvent se retrouver dans des situations oĂč la preuve de l’exploitation est difficile Ă  Ă©tablir, retardant l’accĂšs Ă  la protection.
Sanctions pĂ©nales renforcĂ©esPeines non proportionnĂ©es aux circonstances individuelles – Le texte propose des peines maximales sans tenir compte de la vulnĂ©rabilitĂ© du mineur.Les victimes peuvent ĂȘtre perçues comme « victimes de la loi » plutĂŽt que comme des personnes Ă  protĂ©ger, aggravant le traumatisme.
CrĂ©ation d’un service d’accueilManque de spĂ©cificitĂ© sur la formation des professionnels – Le texte ne dĂ©taille pas les compĂ©tences requises pour le personnel du service.Les victimes peuvent ĂȘtre confrontĂ©es Ă  des professionnels non formĂ©s aux traumatismes complexes, augmentant le risque de retraumatization.
CoopĂ©ration internationaleAbsence de mĂ©canismes de suivi post‑intervention – Le texte ne prĂ©voit pas de suivi des victimes aprĂšs la libĂ©ration du rĂ©seau.Les victimes peuvent se retrouver sans soutien aprĂšs la libĂ©ration, augmentant le risque de rechute ou de nouvelles formes d’exploitation.

Analyse


4. Évaluation de l’impact sur les victimes (approche psychotraumatique)

Ce qui est retenu de la proposition de loi intĂ©graleApports spĂ©cifiques de Mme ThiĂ©baultImplications psychotraumatiques
Reconnaissance juridiqueIntĂ©gration d’une approche « trauma‑informed » – Mme ThiĂ©bault propose l’adoption de protocoles de prise en charge psychotraumatique (ex. EMDR, thĂ©rapie narrative).Les victimes bĂ©nĂ©ficient d’un cadre de soins qui reconnaĂźt la complexitĂ© de leurs traumatismes, rĂ©duisant le risque de retraumatization.
CrĂ©ation d’un service d’accueilFormation spĂ©cifique des professionnels – Mme ThiĂ©bault exige une formation en psychologie du traumatisme pour tout personnel d’accueil.Les victimes rencontrent des interlocuteurs sensibles Ă  leurs besoins, amĂ©liorant la confiance et la coopĂ©ration.
Fonds de rĂ©paration psychologiqueAccĂšs gratuit aux thĂ©rapies spĂ©cialisĂ©es – Mme ThiĂ©bault garantit un financement complet pour les thĂ©rapies de longue durĂ©e.Les victimes peuvent suivre un traitement complet sans contraintes financiĂšres, favorisant la rĂ©silience.
Parcours de rĂ©insertionSuivi psychologique continu – Mme ThiĂ©bault propose un suivi psychologique sur 12 mois aprĂšs la libĂ©ration.Les victimes bĂ©nĂ©ficient d’un soutien continu, rĂ©duisant les risques de rechute et de nouvelles formes d’exploitation.

Analyse


5. Comparaison avec les lĂ©gislations Ă©trangĂšres (Espagne et pays nordiques)

AxeFrance (O 044)Espagne (Ley 3/2021)Finlande (Laki 2020)Suùde (Lag 2022)
Reconnaissance juridiqueProstitution infantile = violence sexuelleProstitution infantile = crime d’exploitationProstitution infantile = crime d’exploitationProstitution infantile = crime d’exploitation
SanctionsPeines de 5–15 ans (selon gravitĂ©)Peines de 3–10 ans + amendesPeines de 2–8 ans + amendesPeines de 2–10 ans + amendes
Protection des victimesOrdonnances de protection, service d’accueilOrdonnances de protection, service d’accueilOrdonnances de protection, service d’accueilOrdonnances de protection, service d’accueil
Approche psychotraumatiquePas de cadre expliciteProgramme national de soutien psychologiqueProgramme national de soutien psychologiqueProgramme national de soutien psychologique
Coopération internationaleCoopération UE + ONUCoopération UE + ONUCoopération UE + ONUCoopération UE + ONU
SpĂ©cificitĂ©sPas de « responsabilitĂ© pĂ©nale des exploitants »ResponsabilitĂ© pĂ©nale des exploitantsResponsabilitĂ© pĂ©nale des exploitantsResponsabilitĂ© pĂ©nale des exploitants

Analyse


SynthĂšse globale

AxeCe qui est retenuApports de Mme ThiĂ©baultImplications pratiques
Alignement juridiqueReconnaissance de la prostitution infantile comme violenceRenforcement de la responsabilité pénale des exploitantsMeilleure protection juridique des victimes
InnovationFonds de rĂ©paration psychologiqueApproche trauma‑informed + rĂ©seau inter‑institutionnelAccĂšs facilitĂ© aux soins psychologiques
Critique des Ă©cartsManque de prĂ©cision sur l’exploitationFormation spĂ©cifique des professionnelsRĂ©duction du risque de retraumatization
Impact psychotraumatiqueService d’accueilSuivi psychologique continuAmĂ©lioration de la rĂ©silience des victimes
Comparaison internationalePas de cadre national de soutien psychologiqueAdoption de programmes nationauxAlignement avec les meilleures pratiques européennes

Recommandations pratiques

  1. Intégrer un cadre national de soutien psychologique (programme national, financement dédié).
  2. DĂ©finir prĂ©cisĂ©ment les critĂšres d’exploitation (contrĂŽle, coercition, etc.) pour Ă©viter les interprĂ©tations divergentes.
  3. Former tous les intervenants (police, justice, services sociaux, santĂ©) Ă  la prise en charge trauma‑informed.
  4. Mettre en place un rĂ©seau inter‑institutionnel (justice, santĂ©, Ă©ducation, services sociaux) pour garantir la continuitĂ© du parcours.
  5. Adopter la responsabilité pénale des exploitants (exploitation de réseaux) pour renforcer la dissuasion.
  6. Établir un suivi psychologique post‑libĂ©ration d’au moins 12 mois pour les victimes de prostitution infantile.

En appliquant ces mesures, la France pourra non seulement aligner son cadre juridique sur les standards européens, mais aussi offrir aux victimes un accompagnement complet, respectueux de leur vécu traumatique, et ainsi améliorer leurs chances de réintégration et de guérison.